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Archive pour mars 2009

La Promesse d’Hubert Mingarelli

Voici le nouveau roman de l’auteur d’Hommes sans mère,  de La Beauté des Loutres, de La dernière neige entre autres. Encore un roman dont le héros  est un homme. Les femmes sont souvent absentes ou dans l’ombre dans l’univers de ce romancier. Les hommes sont très présents, même s’ils ne sont jamais vraiment décrits physiquement car les personnages cherchent  à savoir qui ils sont plutôt que à quoi ils ressemblent. Ainsi Vassili, le compagnon d’ »école de mécaniciens de la flotte » dit à Fedia à propos de leur instructeur Goussegov  » demande-toi qui il est »,  » Cherche à savoir qui est Goussegov ». Leur amitié date de cet épisode et « la promesse » dont le livre porte le titre éponyme n’est pas celle qu’on imagine au début du roman quand Fedia part seul, sans son fils, sur le lac, avec une petite boîte d’allumettes remplie d’une partie des cendres de Vassili. La quête de l’endroit propice où déposer ces cendres est celle du personnage lui-même qui cherche cette fois à savoir qui était Vassili , qui il est lui-même et quelle valeur accorder à cette promesse que Vassili lui avait faite « que toi et moi nous ne serions plus jamais loin l’un de l’autre » .

Pour moi, la réponse est dans ce passage magnifique et bouleversant des retrouvailles de Vassili et de Fedia après plusieurs mois de navigation chacun sur un bateau différent: « Et avant même qu’il [Vassili] eut fini de  traverser la passerelle jusqu’à lui , Fedia sut qu’il avait l’âme et le coeur brisés. » Et aussi dans cette phrase terrible de lucidité à la fin du roman: »Et c’est ainsi qu’il se vit quitter le glorieux bateau de Vassili, brisé, mais en emportant aussi tout au fond de lui une honte pour lui-même, invisible, et si grande qu’elle ne l’avait jamais quitté d’une seconde, qu’elle avait toujours marché à côté de lui, comme un chien rusé disparaissant chaque fois qu’il mordait, et qui le mordait encore cette nuit, alors qu’il tirait sur les avirons. »

Qu’est -ce que cette honte si ce n’est celle qu’on éprouve lorqu’on a trop entièrement cru en quelqu’un et que la confiance aveugle, naïve, enfantine, n’était pas réciproque? Ce roman, c’est peut-être celui d’un être qui n’a pas su grandir. Comment pourra-t-il raconter cette douleur à son fils comme il le lui a promis avant de partir, lui qui n’a pas encore surmonté ce chagrin d’avoir perdu un ami bien avant qu’il ne meure?

Encore un beau roman, attachant, si près des sentiments humains.

 Fedia boit du café, préparé dans un thermos. Je boirais bien un café aussi, pas trop fort en relisant certains passages de cette écriture si limpide, si liquide.