SHIBUMI de Trevanian

Posté le Mercredi 22 octobre 2008

Shibumi de Trevanian, roman de 441 pages. Roman d’espionnage, comme le dit la 4ème de couverture, mais c’est plus que ça. C’est l’histoire d’un personnage, sorte de gentleman-tueur, élévé dans la tradition japonaise,maîtrisant 5 ou 6 langues, emprisonné pour des raisons de lutte de pouvoir entre les Russes et les Américains au lendemain de la 2ème guerre mondiale. Torturé, drogué, rendu presque fou de solitude et qui s’en sort par la seule force de son esprit, il met la main sur des livres écrits en basque et apprend le basque comme Le joueur d’échecs apprend les échecs tout seul dans sa cellule pour ne pas devenir fou. Il n’aura d’autres buts une fois sorti que se venger de ses tortionnaires…je n’en dis pas plus.Mais si je vous dis: -prison, isolement, vengeance -éducation, connaissances, éthique -propiétés, fortune, château -réseau de connaissances, secrets des « grands » de ce monde -vit avec une très belle femme un peu mystèrieuse – sens du sacrifice, fidélité -foi dans la parole donnéeVous penserez peut-être à un autre roman, je vous aide, un roman du XIXème siècle.

Bref, lisez Shibumi et dégustez un thé japonais assis devant une petite table basse, face à un jardin agencé pour écouter la pluie sur les pierres, sur les feuilles, sur le sable, puis laissez-vous porter comme Nicholaï Hel vers une prairie juste agitée par un vent léger…

tapti @ 14:03
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FUIR de Jean-Philippe Toussaint

Posté le Jeudi 11 septembre 2008

Shangaï et Pékin sont les lieux d’une fuite  en voiture, en taxi, en train, en moto. Le narrateur doit remettre une enveloppe contenant une grosse somme d’argent  à un certain Zhang Xiangzhi, relation d’affaires de Marie, restée à Paris. Il rencontre Li Qi, jeune chinoise avec qui il a un bref moment d’intimité, interrompu par la sonnerie du portable que Zhang Xiangzhi lui avait mis d’office dans la main à son arrivée en Chine. Et ce téléphone lui apprend la mort accidentelle du père de Marie.L’argent sert à acheter de la drogue, ce qui sera la cause d’une fuite en moto à travers les rues de Pékin pour échapper aux policiers et cacher le petit paquet. Le narrateur semble subir passivement tous ces événements mais il nous fait pénétrer dans ses pensées et nous comprenons qu’il fuit à sa manière tout ce qui lui arrive. La mort du père de Marie lui fait avancer son retour en France et nous assistons alors au retour du narrateur sur des lieux aimés, auprès d’une femme aimée mais qu’il a eu besoin de fuir pour la retrouver. Dans les dernières pages du roman, c’est elle qui le fuit pour le forcer à la rejoindre et tous deux communient dans les larmes et l’eau de mer. L’écriture est froide, technique, précise. Les phrases sont souvent longues, comme si les mots se poussaient les uns les autres vers la fin, vers les derniers mots de l’histoire. L’auteur dit ce qui se passe, dit les choses, dit les actes. Pas de dialogues au discours direct, que des paroles indirectes pour mieux mettre à distance les émotions, les sentiments des personnages. Le titre contient à lui seul tout le roman: fuir l’amour, fuir la mort, fuir les sentiments, fuir la vie peut-être parce qu’on a peur du contact avec l’autre.

Un beau roman, un style très étrange et qui ne laisse pas indifférent.

Que boire en lisant ce roman? Le cocktail que Li Qi commande au barman du bowling: « un cocktail spécifique qui semblait nécessiter des recommandations particulières, avec des dosages particuliers, de couleurs et d’alcools, des soupçons et des larmes, de vert, de blanc et d’ambre. »

tapti @ 18:48
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Le village de l’allemand ou le journal des frères Schiller de Boualem Sansal

Posté le Mercredi 4 juin 2008

Un très beau roman, émouvant, qui associe de manière très juste les nazis et les intégristes musulmans. Une belle écriture à deux voix, celle de deux frères qui se découvrent pas delà la mort. Et surtout de refus du mensonge, cette volonté de faire éclater la vérité coûte que coûte pour vivre plus légèrement: »Et s’ils me posent la question:Et toi que feras-tu?Je leur répondrai:Dire la vérité, partout dans le monde. Après, on verra. »

Boire un thé à la menthe ou  une bonne bière bien fraîche.

tapti @ 10:14
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La route de Cormac McCarthy

Posté le Jeudi 3 avril 2008

Un père et son fils, dans un contexte improbable ou que l’on espère tel. Les événements qui ont eu lieu, l’environnement dans lequel ils vivent, la lutte pour la vie à chaque seconde, sans répit, sans espoir c’est ce qui fait avancer ces personnages. La voilà la route sur laquelle ils marchent, avec comme seul but d’aller vers le Sud. Et pourtant, ils vivent ces deux personnages, par leur relation, par leur volonté de rester des « gentils », c’est-à-dire des êtres humains. C’est bouleversant. L’écriture surtout me touche. Quel beau travail de traduction! Des phrases construites de telle façon que le lecteur voit les gestes, les attitudes, ressent les sentiments des personnages, leurs émotions alors que le champ lexical des émotions et des sentiments est quasiment absent de ce livre. Mais tout est dit dans ce qui n’est pas dit mais montré. Tout est dit de manière si juste dans les dialogues aussi. Ecoutez: » Il y avait dans le plancher un anneau vert-de-grisé. Il allongea le bras et reprit le balai et balaya la cendre. Il y avait des traits de sciage dans les planches. Il nettoya les planches avec le balai et s’agenouilla et replia les doigts dans l’anneau et souleva la porte de la trappe et l’ouvrit. » Ce « replia les doigts dans l’anneau« …Comme si on nous passait les images d’un film au ralenti ou image après image. Et cela donne tellement de chair aux personnages! Et ce dialogue:

 » On ne mangerait jamais personne, dis-moi que c’est vrai?

Non.Evidemment que non.

Même si on mourait de faim?

On meurt déjà de faim maintenant.

Tu as dit que non.

J’ai dit qu’on n’était pas en train de mourir. Je  n’ai pas dit qu’on ne mourait pas de faim.

Mais on ne mangerait personne?

Non. Personne.

Quoi qu’il arrive?

Jamais. Quoi qu’il arrive.

Parce qu’on est des gentils.

Oui. »

Un quête de vérité des personnages, de leur relation qui est aussi celle d’une écriture la plus riche et la plus dépouillée à la fois. Chaque objet décrit ou évoqué est appelé par son nom exact, technique s’il le faut. Aucun à peu près, les gestes sont décomposés, les paroles sont le plus souvent brèves parce que les mots ne peuvent dire les sentiments, mais ces quelques mots entre le père et l’enfant sont lourds d’une telle intensité, d’une telle vérité de ce qui est éprouvé que le lecteur est constamment ému, au bord des larmes. Comme les personnages qui pleurent aussi. Ces larmes on les retrouve dans les autres romans de l’auteur. Lisez La trilogie des confins: ces jeunes cow boys qui partent chercher l’aventure et surtout quittent un quotidien sans travail et sans espoir, ne parlent pas beaucoup mais s’arrêtent parfois au bord des chemins et versent des larmes. Il y a chez Cormac McCarthy quelque chose de tragique. Les larmes sont purificatrices et elles sont l’expression vraie d’un bouleversement. On peut parler faux, on ne peut pas pleurer faux.

Alors que boire après une telle lecture, un tel coup de poing? Moi, j’ai eu la gorge trop serrée et je n’ai rien avalé. Sauf ce livre qui restera un de mes livres de chevet.

tapti @ 10:22
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L’éternité de l’instant de Zoé Valdés

Posté le Mercredi 13 juin 2007

Enfin un vrai roman! Pas un récit à la première personne plus ou moins autobiographique. De la Chine à Cuba, une histoire de passions: passion pour la musique, pour le chant, pour la calligraphie, la médecine et la méditation, passion entre un homme et une femme, passion d’un fils pour son père qu’il ira chercher au-delà des océans et qui réunira ses parents séparés pendant des années, passion d’un grand-père centenaire pour sa petite fille. Des personnages magnifiques, qui dialoguent avec les nuages, « les grillons et les lucioles », avec les papillons, les oiseaux et les chevaux,  qui cherchent à atteindre au plus près ce qui fait l’humanité de l’homme et pour qui « ce qu’il y a de plus grand au monde c’est l’amour. » Réalisme et poésie, les époques s’entrechoquent, se répondent et certaines secondes d’intensité sont tellement fortes que leur seul souvenir les rend éternelles et maintiennent le personnage principal vivant au point qu’il ne peut pas mourir puisqu’il a « oublié comment on meurt… »

Que boire en lisant ce roman? Savourer un thé très chaud, « délicieux et relativement cher« , celui que Mo Ying déguste lors de ses retrouvailles avec ses soeurs et sa mère avant de les amener voir leur père parti de Chine des années auparavant pour faire fortune à Cuba.

tapti @ 21:48
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U.V. de Serge Joncour

Posté le Mardi 29 mai 2007

Roman à l’écriture métallique, presque glaciale, des personnages brûlés par le soleil et la passion, une fin toute en ambiguïtés, très cinématographique. »Dans les verres de ses Ray- Ban, les reflets scandaient du plan par plan; la pelouse vert émeraude lissée comme un velours, le Trianon de pierres blanches, la piscine au bas des marches, les fauteuils translucides qui ondulaient dessus , les transats en teck, vides eux aussi, cette suprême désinvolture du luxe quand il confine à la négligence, un climat dans lequel il se retrouvait pleinement. »

A lire en buvant une coupe de champagne!

tapti @ 15:56
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Les Bienveillantes de Jonathan Littell

Posté le Jeudi 12 avril 2007

Au secours! comment faire pour terminer ce livre? Un mot résume mes impressions de lectrice: indigestion. Je ne digère pas les pages et les pages de descriptions truffées de sigles pour initiés au point que l’éditeur a ajouté un glossaire  et une table des grades à la fin du volume ( 8 pages), je ne digère pas les descriptions des massacres si réalistes qu’elles en deviennent invraisemblables, je ne digère pas le personnage-narrateur, sombre monstre qui survole cette histoire avec tellement de légèreté qu’il en perd sa crédibilité de personnage de roman, je ne digère pas le style parfois maladroit, très différent selon les passages, selon que le personnage raconte ce qu’il voit, ce qu’il vit personnellement, ce qu’il fait ( y aurait-il plusieurs scripteurs?).Enfin, je ne comprends pas qu’il ait eu le prix Goncourt.

Boire un bon chcolat chaud avec de la chantilly pour se remettre…

tapti @ 16:20
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Chaleur du sang d’Irène Némirovsky

Posté le Jeudi 22 mars 2007

En 2004, Suite française obtient le prix Renaudot. Son auteure, née en 1903 à Kiev, est morte, assassinée à Auschwitz en 1942! Ses romans, publiés par sa fille, n’en sont que plus émouvants. Mais c’est surtout son écriture qui séduit. C’est une voix, un ton, un air à la fois surrané et si actuel qui vous poursuit une fois le livre fermé. J’avais déjà beaucoup aimé Suite française, Le maître des âmes,l’histoire de ce médecin devenu malgré lui charlatan et qui perd son âme, Le bal ce petit livre sur les relations conflictuelles et dramatiques entre une fille et sa mère. J’ai lu Chaleur du sang d’une traite, avec une pause parce qu’on m’avait emprunté le livre et que la personne qui le lisait ne pouvait pas s’en détacher. Une histoire contée par un narrateur qui nous intrigue très vite tant il a l’air de regarder les moeurs de ses concitoyens avec détachement mais aussi avec un intérêt suspect. L’intrigue est celle d’un roman policier, le thème est celui de l’amour-passion qui jette des êtres jeunes et fougueux dans les bras l’un de l’autre, le propos est celui de la tragédie provoquée par la passion, tragédie tempérée par la loi du silence que les villageois respectent car, ce que veulent avant tout les gens de ce pays (Issy L’Evêque),c’est « qu’on les laisse tranquilles ». C’est magnifique car intemporel.
Le narrateur, qui vous révèlera le fin mot de l’histoire, s’extasie devant les qualités culinaires d’ Hélène: »Quelle ménagère que ma cousine Hélène!Comme elle s’entend aux confitures, aux conserves, à la patisserie! » et plus loin vous aurez envie de déguster ces « énormes tartes blondes qui cuisent au four », « les tourtières bourrées de cerises et luisantes de beurre » patisseries qui sont autant de métaphores de l’amour et du désir et dont Silvio, le narrateur, semble prendre un malin plaisir à les décrire, comme il observe les protagonistes de cette histoire, avec une tendre ironie.
Lisez ce roman en dégustant une tarte aux prunes , allongé sur l’herbe et à l’ombre d’un arbre fruitier…

tapti @ 0:04
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Le patrimoine de l’humanité

Posté le Jeudi 22 mars 2007

Saviez-vous que les gardiens de musée rêvent d’être des Jimi Hendrix et en attendant la goire qu’ils se font de lignes de coke dans les caves des musées, qu’ils terrorisent les visiteurs et qu’ils les séquestrent pour obtenir que leur collègue dealer sorte de prison?

Nicolas Beaujon raconte l’histoire d’un perdant, d’un minable qui sait qu’il ne vaut pas grand chose mais qui regarde toute cette histoire avec beaucoup d’ironie et d’humour.

J’ai ri, aux éclats parfois, c’est drôle et ça fait du bien.

A lire d’un trait en buvant un petit café bien fort avec une praline.

tapti @ 0:00
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Terre des oublis

Posté le Samedi 17 mars 2007

Duong Thu Huong, auteure vietnamienne, nous emporte dans une histoire mélancolique, racontée avec poésie et réalisme que j’ai lue dans un seul souffle! Et j’ai éprouvé l’envie d’être auprès de l’héroïne, Miên, de l’aider à surmonter ses épreuves tout en dégustant avec elle le thé dont le parfum « se mélangeait à celui des braises, exhalant une senteur délicate et chaleureuse qui évoquait à la fois l’odeur des montagnes, des colllines lointaines, désertes, et celle des rues grouillantes où les foules se battent autour d’une proie. »

Voilà un vrai roman, une histoire d’amour magnifique, romantique et aussi un voyage dans ce pays plein d’odeurs et de saveurs. Vous trouverez dans ce roman de nombreuses recettes de gateaux au riz gluant par exemple, qui mettent l’eau à la bouche.

Aux éditions Sabine.Wespieser.

tapti @ 16:00
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